Les multiples formes de cancers, les récentes épidémies de grande ampleur ou les troubles psychologiques comptent certainement parmi les pires maux de notre époque. Il n’en existe pas moins d’autres, moins spectaculaires mais qu’on ne peut ignorer. Le surpoids et l’obésité en font partie. Ces deux dernières pathologies s’avèrent de plus en plus préoccupantes, d’autant plus que les enfants et les jeunes gens y figurent toujours davantage. L’Organisation Mondiale de la Santé prévoit d’ailleurs que la part de la population française affectée par ce phénomène sera comprise entre 25 et 29% en 2030.[i]
Nous savons généralement assez bien expliquer les raisons de cette croissance du surpoids et de l’obésité : alimentation déséquilibrée (peu de légumes et de fruits frais au profit de plats industriels), abondance de viennoiseries, de sucreries, grignotage tout au long de la journée et manque flagrant d’exercice physique. À ces diverses raisons peut venir s’ajouter parfois l’hérédité.
Combattre l’obésité suppose donc une discipline alimentaire renforcée par une hygiène de vie, un double objectif d’ailleurs depuis longtemps prôné par les pouvoirs publics. Ainsi, depuis 2001, le Programme National Nutrition Santé (PNNS) est un plan de santé publique visant à améliorer l’état de santé de la population en agissant sur l’un de ses éléments majeurs : la nutrition. Pour le PNNS, la nutrition s’entend comme l’équilibre entre les apports liés à l’alimentation et les dépenses occasionnées par l’activité physique[ii].
Toutefois, en dépit de ces louables efforts, l’obésité continue de progresser et concerne de plus en plus d’enfants. Où en sommes-nous aujourd’hui?
Sans surprise, l’obésité infantile touche majoritairement les enfants des milieux défavorisés — ce dont témoigne la répartition géographique de cette maladie avec des taux notablement élevés dans les Hauts-de-France (22%) et, surtout, dans certains départements et régions ultra-marins, particulièrement affectés par cette épidémie avec un pic à 47% à Mayotte[iii].
Cependant, les personnes les plus âgées figurent aussi parmi les plus atteintes par le surpoids et l’obésité : l’excès de poids touche 57,3 % des 65 ans et plus contre 23,2% des 18-24 ans d’après une enquête coordonnée par l’Inserm[iv].
Néanmoins, d’après la ligue nationale contre l’obésité, 34% des enfants de 2 à 7 ans et 21% des enfants/jeunes de 8 à 17 ans sont en situation de surpoids ou d’obésité. Parmi les 8-17 ans en situation d’obésité, les jeunes garçons sont presque deux fois plus nombreux (62%) que les jeunes filles (38%). On observe aussi dans cette population une surreprésentation nette des jeunes issus de catégories populaires et inactives (chômeurs, femmes/hommes au foyer) : 75% des 8-17 ans en surcharge pondérale sont issus de ces catégories, soit 9 points de plus que dans la population générale.[v]
Cette surreprésentation des catégories populaires et inactives dessine une nette répartition géographique : ainsi les départements d’Outre-Mer (Martinique et Guadeloupe), les régions Grand Est et Hauts-de-France concentrent-elles le plus grand nombre de personnes obèses ou en surpoids alors que les Pays de la Loire et l’Ile-de-France sont les régions qui en comptent le moins. Les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie figurent légèrement en dessous de la moyenne.[vi]
S’il est relativement facile d’imaginer les problèmes dûs au surpoids et à l’obésité chez l’adulte, il est moins évident d’envisager ceux relatifs aux enfants. Ils sont pourtant nombreux :
- difficultés respiratoires,
- troubles musculosquelettiques,
- risque accru de fractures,
- hypertension artérielle.
De plus, les enfants et adolescents en situation de surpoids ou d’obésité sont généralement moins épanouis, ont une moins bonne image de leur corps, sont plus souvent harcelés et peuvent avoir de moins bons résultats scolaires.[vii]
Nous parlions, en introduction, d’affections apparemment plus inquiétantes que le surpoids et l’obésité ; cependant, nous avons constaté que ces deux dernières pathologies progressent et affectent plus particulièrement les jeunes. La politique menée à l’encontre de ces maux, sans s’avérer inutile, n’a donc pas pleinement porté ses fruits. Pour autant, il ne s’agit pas de renoncer mais plutôt de redoubler d’efforts. Comme le conseille et le pratique l’association “Le jardin d’Alcinoos”, enrayer la progression de l’obésité passe forcément par une éducation alimentaire :
- apprendre à consommer moins de sucre, de viande, de laitages, de pâtisseries,
- consommer davantage de fruits, de légumes, de légumineuses, de fruits secs et de céréales complètes,
- pratiquer régulièrement une activité physique.
Le Jardin d’Alcinoos avec la collaboration d’acteurs locaux, de Roissy Pays de France, dans chacune des villes où l’association sera présente, mettra en place des ateliers nutrition pour les familles monoparentales ayant un ou plusieurs enfants de 0 à 14 ans. L’objectif de ces ateliers est de présenter une nouvelle manière de cuisiner plus saine pour enrayer cette pathologie. Parents, cuisinières et nutritionniste, vont conjuguer le partage, et le plaisir, de préparer un repas équilibré, appétissant et une assiette dont le dressage excite le sens visuel. Le tout dans un souci d’économie afin de pouvoir reproduire l’expérience partagée.
La cuisson aussi est un facteur important ; si les rapports suivants sont bien connus: qu’un aliment est associé à un indice glycémique et qu’un indice glycémique élevé peut engendrer du surpoids, on oublie parfois que la cuisson modifie précisément l’indice glycémique d’un produit alimentaire. Manger des frites n’est pas la même chose que manger des pommes de terre cuites à la vapeur.
À défaut de mettre en place de telles pratiques, l’obésité et son cortège de pathologies deviendront la norme. En d’autres temps, et pour d’autres raisons, Albert Camus écrivait:
« Rien n’est moins spectaculaire qu’un fléau et, par leur durée même, les grands malheurs sont monotones ».
[i]Obésité des enfants : l’urgence d’agir – France Assos Santé (france-assos-sante.org)
[ii]Le programme national nutrition santé – Ministère du travail, de la santé et des solidarités (sante.gouv.fr)
[iii]https://www.france-assos-sante.org/2023/09/27/obesite-des-enfants-lurgence-dagir/
[iv]Obésité et surpoids : près d’un Français sur deux concerné. État des lieux, prévention et solutions thérapeutiques – Salle de presse de l’Inserm
[v]Forte progression de l’obésité en France en 2020. | Ligue nationale Contre l’Obésité (liguecontrelobesite.org)
[vi]Obésité et surpoids, quels sont les taux en France en 2023 ? (madietenligne.fr)
[vii]https://www.has-sante.fr/jcms/p_3320587/fr/surpoids-et-obesite-chez-l-enfant-vers-une-prise-en-charge-globale-et-multidimensionnelle